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Super Hydrau et les mauvais barrages

22 février 2007 - Super Hydrau et les mauvais barrages

À la suite d'un grave incident survenu le 29 janvier 2006 sur le barrage de Tuilières où la rupture d'une vanne rouillée a entraîné le déversement subit de 5 millions de mètres cubes d'eau dans le lit de la Dordogne, la Direction production et ingénierie hydraulique (DPIH) d'EDF a inspecté les 450 barrages déployés en France. Un rapport de synthèse confidentiel de 10 pages a été établi en août 2006, recensant les problèmes diagnostiqués par les ingénieurs hydrauliciens, et rendu public par le magazine économique Capital.

Le rapport dresse la liste des barrages menacés (« fissurations », « déformations », « fuites importantes », « corrosion avancée », etc ) et des risques éventuels (« risque de rupture », « risque de débordement », « risque d'effondrement d'une route », etc.). Il se présente sous la forme de tableaux dont la 2e colonne indique le nom du barrage, la 3e la partie du barrage examinée, la 5e le degré de risque, classé selon une échelle de A (risque faible) à A+ (risque élevé), la 6e le diagnostic résumé sur l'état du barrage et la 8e la recommandation de travaux à effectuer. Au total, près de 200 barrages hydrauliques y sont recensés, sur les 450 exploités par EDF, comme étant vétustes et dangereux pour l'environnement et les habitations.

Les problèmes sont essentiellement concentrés dans les Alpes, mais les barrages du Massif central et des Pyrénées sont aussi concernés. Le rapport répertorie un « risque d'instabilité du mur » pour le barrage de Noyer-Chut (Isère), une « fissuration voûte » et des « fuites membranes » à La Girotte (Savoie) et un « état de dégradation avancée » au Verney (Isère). Parmi les barrages les plus dangereux de France figurent celui de Mauzac (Dordogne), où le rapport note un « risque de rupture », celui de Viclaire (Savoie) avec un « risque d'effondrement de la galerie sur un village » et le barrage de Fond-de-France (Isère), où sont apparues des « fuites dans la digue avec une zone très habitée à l'aval ».

EDF a aussitôt réagi en annonçant une rallonge de 500 millions d'euros pour la rénovation des 200 installations concernées. Ces fonds seront investis sur une période allant de 2007 à 2011 dans le cadre d’un programme baptisé Super Hydrau. La rénovation du seul barrage de Tuilières en Dordogne nécessitera jusqu'à 80 millions d'euros d'investissements, soit près de 20% du budget du plan Super Hydrau. Pierre Gadonneix, le Président d’EDF, a affirmé qu'il allait « relancer l'investissement et de façon massive ». « EDF a un formidable patrimoine de production et nous n'avons pas investi depuis 10 ans. Il est urgent de rénover, de moderniser et de développer ce patrimoine », a-t-il conclu. « Cette décision du président d'EDF a d'ailleurs été inscrite au plan moyen terme des investissements », explique le groupe dans un communiqué.

« L'ensemble des risques techniques détectés sur les ouvrages hydrauliques a été mesuré », précise EDF, ajoutant que « les ouvrages hydrauliques sont conçus pour une durée de vie qui dépasse largement le siècle. Aujourd'hui, l'âge moyen des centrales hydroélectriques d'EDF n'est que de 50 ans et elles affichent des niveaux satisfaisants de performance et de sûreté. » EDF admet néanmoins que « les installations sont davantage sollicitées que par le passé, en particulier pour faire face aux pics de consommation ». EDF précise qu' « un contrôle systématique des ouvrages est assuré quotidiennement et des opérations d'entretien sont menées régulièrement. Par ailleurs, les barrages sont soumis, en lien avec les services du ministère de l'Industrie, à des visites décennales approfondies pour contrôler leur solidité et leur sûreté. »

Nous espérons ne plus connaître la tragédie que vécut Fréjus et ses environs le 2 décembre 1959 après la rupture tragique du barrage de Malpasset, qui fit en quelques minutes 423 morts. Nous pouvons rappeler néanmoins le cas d’école du barrage du Chambon, à Mizöen-en-Oisans, atteint du cancer du béton. Construit en 1935, c'est l'un des premiers barrages de France et les experts se sont aperçus en 1995 qu’il s'était soulevé de 7 centimètres en 25 ans ! Une véritable hydrophobie... La présence de l’eau soutenue par le barrage avait déclenché une réaction chimique entre les alcalins du ciment et la silice des granulats composant le béton. Cette silice s’était alors transformée en un autre composant, plus volumineux. La pression interne qui s’ensuivait risquait de conduire à l’éclatement de la structure du matériau. On a donc pratiqué de grandes saignées : il s'agissait alors de scier à intervalles réguliers le béton du haut du barrage afin de limiter les poussées dues au gonflement. Le coût initial (250 millions de francs) prévu pour la rénovation du barrage qui s’est terminée en 2000 avait largement été dépassé !

Pour en savoir plus sur l'énergie hydraulique en France et ses véritables potentiels de développement aujourd'hui, mais surtout aborder de façon objective les enjeux liés au développement des énergies renouvelables en France et en Europe, pour mieux envisager les alternatives qui existent pour sortir de notre consommation d'énergies fossiles, vous pourrez vous reporter à l'ouvrage Énergies alternatives (Omniscience, 2011).
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